Nicolas Jolivot, paraplégique, pilote et son association Cœur rallye
Privé de ses jambes mais pas de sa tête
Paraplégiques, ils sont, passionnés de course automobile, ils resteront. Mieux encore, Nicolas Jolivot a développé et inventé un système pour freiner et rétrograder en même temps juste avec sa main droite sur sa C2 de compétition. Une invention qui a fait l’objet d’un reportage en novembre dernier dans l’émission AB Motor V6, c’est dire tout l’intérêt de cette innovation dans le monde automobile et qui concerne les pilotes handicapés principalement privés de l’action de leurs jambes.
Une erreur et une lombaire qui explose
Nicolas Jolivot est jeune et avec sa femme Amélie, ils partagent cette passion du rallye automobile. De suivre son père sur les épreuves, Nicolas passe alors du rôle de spectateur à celui d’acteur, alors sur le trottoir rue Foch au Creusot, il commence à construire sa ZX « juste avec un jeu de clés, j’avais 20 ans ». Il enchaîne les rallyes régionaux mais il y a quatre ans, à cinq cents mètres de chez lui, le 27 octobre 2016, c’est la grosse tuile, « une erreur de jeunesse » reconnaît-il aujourd’hui. Il roule vite. Dans le choc, la lombaire numéro 1 explose et compresse la moelle épinière. Nicolas Jolivot est paraplégique des deux jambes.
Il aurait pu se morfondre dans son coin laissant ainsi de côté son intérêt pour le rallye, sauf que Nicolas est tenace et quand à Mardor où il passe huit mois en rééducation, il fait un test de conduite sur un véhicule adapté
à son handicap, « j’ai pensé me remettre en selle », explique-t-il avec un sourire qui en dit long sur sa motivation.
Une invention à 750€
Certes, il a besoin d’aide, alors chez lui, désormais à Dracy-les-Couches, avec sa femme, son kinésithérapeute, un ami mécanicien et un autre pilote comme lui paraplégique, Damien Michot, ils se mettent à réfléchir pour améliorer le pilotage d’une voiture de rallye seulement avec les deux bras. A partir d’un système d’embrayage italien, Nicolas va étudier puis mettre au point « son » invention. « Avec la main gauche j’accélère et avec la droite, je peux à la fois freiner et rétrograder avec une boîte séquentielle ». Coût de l’opération, 750€ plus les 2500€ pour l’embrayage piloté contre 14 000€ avec les Italiens. « Je ne veux pas en faire un commerce mais si un handicapé nous demande de l’aide, nous sommes là. Je veux simplement qu’on sache que ce système existe ».
Voilà aussi pourquoi l’association Cœur rallye avec son logo bien spécifique a pris forme. Tous les membres contribuent à son expansion, même les valides à commencer par Michel Pacaud, élu municipal à Pouilloux et cadre dans une société de transport, participent activement. « Michel, il m’a toujours suivi depuis mon accident et il est même pilote, il a participé au rallye des Gueules noires avec sa 106 » souligne affectueusement Nicolas. « Et sans mes mécanos Régis et Kévin, je serais bien incapable de faire grand-chose ». Sans oublier madame, sa copilote.
Du nu pour une bonne cause
Et il pense à tout Nicolas Jolivot, même au merchandising d’où le calendrier avec des nus artistiques. « Les 175 exemplaires sont tous partis. C’est une manière de remercier nos sponsors et à l’équipe de financer la nourriture sur les rallyes pour une saison » révèle celui qui, à l’origine était chauffeur routier et sans emploi aujourd’hui. Surtout que participer à quatre ou cinq rallyes, revient à 12 000 € par équipage et il y en a trois chez Cœur rallye.
Dans son monde à lui, Nicolas Jolivot ne fait aucun complexe. Il rayonne même. Il conduit, pilote comme tout à chacun sans le regard dans le rétroviseur. « Ce qui est fait est fait mais plus que de ne pas avoir mes jambes, c’est mon père qui me manque ». Les cicatrices de l’âme sont elles indélébiles. Le rallye un bel exutoire.
Jean Bernard