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mardi 21 novembre 2023 à 04:11

Heureusement que nous sommes tous fous



Né un 5 février, le même jour que la création du mouvement Dada, pas la même année, je suis heureux chaque jour de ne jamais souscrire à des visions absolues, des certitudes irréfragables, des alliances dirimantes ou une sagesse certifiée de l’au-delà et plus si affinités.

Dans ces temps troublés, et ça ne risque pas de s’améliorer avec des vœux pieux, retrouver l’absurdité des jours pour en rire avant d’en pleurer fait un bien fou.

Dadaïste à mes heures tout en flirtant avec le surréalisme je suis essentiellement, sûrement le seul de mon espèce, un Absurdo-réaliste. Et j’ai de quoi être content.

Article dans Marianne un article bien documenté et humoristique sur la fabrication de steaks de Saumon sans poisson, mais avec des  mycoprotéines (myco, pour champignon, et protéines, pour protéines). Fusarium venenatum, parfaitement comestibles. Mouais, bon, passons…

https://www.marianne.net/societe/big-brother/du-poisson-fabrique-a-base-de-champignons-le-futur-de-notre-alimentation

Ça va de paire avec ce que l’on trouve dans les rayons des hypers et autres magasins Véganes spécialisés.

Mais s’il faut rire de la bouffonnerie sociale replongeons nous dans la fin du 19ème siècle anglais. La bonne bourgeoisie anglaise avait un principe simple « proscrivons la viande à ce fameux  prolétariat et sous-prolétariat, il se vautre assez  dans les péchés sordides inhérents à la classe ouvrière urbaine, qu’il mange de la soupe de légumes ».

A mourir de rire, de faim et d’inanition. Sauf que, brave quidam amateur de barbaque, le communisme naissant préconisait un peu la même chose pour des raisons opposées bien entendu : « consommer  de la viande encourage l’oppression capitaliste qui se sert des  mêmes armes pour assujettir l’animal et le prolétaire. De plus ce dernier, ce damné bêta de la terre,  s’appauvrit en achetant de la viande chère aux suppôts du capitalisme ». Heureusement que cela fait longtemps que nous sommes tous fous.

Il demeure encore des centres de résistance de cette double pensée dans notre Europe dite sociale.

Dans les années 70 le mouvement Punk a remis au goût du jour cette antienne communiste des grands débuts en faisant de cette vision un combat. Tout azimuts bien entendu on n’est pas demi Punk, cette forme de lutte englobait la société de consommation, la surconsommation, la gloutonnerie et surtout ce principe du chasseur pas trop cueilleur : manger trop de viande, Pouah !

De là, dépassant les pères et mères de l’écologie des débuts, est venue l’idée, de sauver la planète en se restreignant et surtout en réduisant, voire supprimant, les régimes carnés. Le végétalisme, le véganisme n’étaient plus des théories fumeuses ou politiques, mais ces mouvement brandissaient fièrement l’étendard de la sauvegarde de la planète : pas mieux mais pas moins en 9 lettres « véganisme ».

Ce qui ressemble aux travers dénoncés par les Dadaïstes et les surréalistes, c’est la propension à dresser comme dogme, voire même comme précepte quasi religieux des théories qui s’autosuffisent et font pièce de toute pensée contraire. L’urinoir de Duchamp a tout dit de cela, de l’évidence et du manque de recul face à l’absurdité, voire à l’obligation de penser bien et sain, face au conformisme comme seule attitude sociale naturelle.

 

Mais quittons notre système digestif pour aborder le système d’action sociale à destination du 3ème âge : la fameuse Sylver économie.

Nous sommes passés des maisons de retraite à la Bérézina d’un système qui utilise un matériau humain pour faire de l’argent. Une fois que l’on a dit ça on n’a rien dit de la souffrance, de la déshérence des familles, des résidents, des structures et des personnels. Mais bon, c’est comme ça que c’est parce que personne parmi ceux qui pourraient tout changer n’entend enrayer une machine à cash bien huilée.

Régulièrement, pas tous les jours, mais toutes les semaines, le service public à la télé ou la radio, et donc tout le système médiatique ensuite, nous rebat les oreilles avec cette innovation géniale, incontournable et si modernement futuriste : les cyborgs, les IA sur roulette, dans les EHPAD.

Mais que voila donc le truc, la chose, le machin, le bidule le plus absurde des cinquante dernières années. Il n’y a pas assez de budget pour la présence professionnelle humaine ? On n’introduit pas la canithérapie ? Ben, pas le budget, l’humain coûte trop cher et puis les animaux c’est pas simple, faut du monde pour faire fonctionner.

Bref, des génies ont turbiné des jours et des jours pour créer le substitut de l’humain de demain : le robot empathique qui va rendre heureux le vieux à bout de souffle qui rouille dans son chariot à l’entrée de l’établissement. Il y a des simplistes, comme moi qui se disent : « et si quelqu’un lui tenait simplement la main en lui parlant de lui, de sa vie, de sa famille , même du beau temps? »

Heureusement que cela fait longtemps que nous sommes tous fous, nous allons finir par ne plus voir tout ces côtés absurdes et déshumanisés. En attendant je me repasse en boucle les textes législatifs et réglementaires européens et Français concernant la disparition du plastique dans la vaisselle de pique-nique et le service de boissons dans les bars. Mais qu’est-ce qu’on a bien fait de supprimer ça pour arrêter de plastifier les océans afin que des léviathans maritimes transportant  plus de dix mille vacanciers et personnels puissent sillonner nos mers en accrochant du noir aux paupières des nuages.

Et puis il y a l’électricité que l’on produit moins cher que tout le monde mais que l’on doit vendre plus cher pour que ceux qui vendent « notre » électricité pas chère , sans en produit un électron, puissent la revendre en faisant de gros bénéfices. 

Pour en revenir à la viande il y a de la viande Française, enfin vendue comme telle, qui est élevée en argentine commercialisée aux States, découpée ailleurs dans le monde ou sur un bateau dans les eaux territoriales et simplement mise sous blister en France.

Bon, en même temps je ne suis pas la personne la plus adéquate pour juger de cela. Je suis le fils d’une Normande et d’un Bourguignon né dans la Loire ou le Cher (deux patelins portent le même nom), ayant fondé une famille à Paris pour revenir ensuite en Bourgogne du sud. Il y a des traçabilités plus faciles et certifiées.

Comme disaient les fondateurs du mouvement Dada « Nous ne sommes pas assez naïfs pour croire dans le progrès. Nous ne nous occupons, avec amusement, que de l’aujourd’hui. Nous voulons être des mystiques du détail, des taraudeurs et des clairvoyants, des anti-conceptionnistes et des râleurs littéraires. Nous voulons supprimer le désir pour toute forme de beauté, de culture, de poésie, pour tout raffinement intellectuel, toute forme de goût, socialisme, altruisme et synonymisme » et pour la viande sans viande et le poisson sans poisson.

 

Gilles Desnoix

 

 

 

Voir l'article : Montceau News




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