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mercredi 26 juin 2019 à 09:22

Aide sociale à l’enfance

Trois députés se battent pour une refonte globale du système






 

Pas moins de trois députés étaient présents ce mardi à la mairie de Blanzy, pour une table ronde sur le thème « Le statut des assistants familiaux au sein de la protection de l’enfance ».

Ce déplacement intervient dans le cadre d’une mission d’information de l’Assemblée Nationale sur l’Aide Sociale à l’Enfance.

Autour de la grande table du Conseil, des assistants familiaux et des responsables de structures, venus présenter les dysfonctionnements de l’institution et y chercher des solutions durables pour les 300 000 enfants confiés à l’ASE.

Et pour mener le débat, des députés de la majorité La REM, Perrine Goulet (députée de la Nièvre), Delphine Bagarry (députée des Alpes de Haute-Provence) et Caroline Ghulam Nabi, suppléante du député Raphaël Gauvin.

L’enfant placée devenue députée

Les trois députés sont bien évidemment décidés à faire « remonter » les disparités et les paradoxes du système de l’ASE. « L’enfant n’est pas au cœur des débats » disent-ils en chœur.

Perrine Goulet connait bien le sujet, puisqu’elle a été elle-même une enfant placée en foyer. Inutile de dire qu’elle met toutes ses forces, pour porter haut et fort et en haut lieu la parole des enfants placés. Dix ans de vie en foyer, une expérience traumatisante pour celle qui est devenue députée.

« Je souhaite une aide sociale à l’enfance plus juste et plus efficace. Il faut soutenir les familles d’accueil qui sont souvent seules quand elles ont un problème avec l’enfant placé » dira Mme Goulet.

Et cette dernière de raconter : « Je me suis servie d’un reportage qui a été diffusé le mercredi 16 janvier dernier sur France 3 et qui avait pour thème « Enfants placés : les sacrifiés de la République » dans son magazine « Pièces à conviction ».

Précisant : « J’ai donc demandé une commission d’enquête parlementaire qui m’a permis de recueillir des éléments d’information sur des faits précis, ici en l’occurrence sur l’aide sociale à l’enfance et les enfants placés ».

Perrine Goulet est donc le rapporteur de cette mission. Les travaux ont débuté fin mars 2019 et son rapport sera rendu dans une quinzaine de jours. Elle le présentera en effet à l’Assemblée fin juin, début juillet.

Assistants familiaux : des conditions qui se dégradent

Lors de la table ronde de ce mardi matin, chacun a eu l’occasion d’exposer ses revendications, ses difficultés et … sa lassitude quelquefois.

 

Les salaires

« Le métier se complique » exprime une personne en se présentant. Se disant mieux loti il y a dix ans que maintenant.  En effet, elle constate que financièrement, le salaire n’est pas motivant.

Et un autre problème a été soulevé par les assistants familiaux : les familles qui accueillent des enfants très jeunes 7 jours sur 7 sont rémunérés par le département, comme une famille qui accueille un enfant qui est scolarisé, donc moins à la maison.

Mais le département a voté depuis un dispositif pour accorder des rémunérations à ceux qui accueillent le ou les enfants 7 jours sur sept. Car il existe de vraies disparités d’un département à un autre…

Les congés et les familles-relais

Quid des congés des assistants familiaux ? « Quand on est absents pour les vacances ou indisponibles pour cause de santé par exemple, que fait-on des bébés ? Il n’y a pas assez de familles-relais. C’est un besoin criant. Car une famille-relais permet à l’assistant familial (AF) et à sa famille de souffler un peu. Mais dans ce cas précis, les candidats ne sont pas légions, car justement, le métier fait peur…

Jeunes de plus en plus complexes : difficultés de recrutement

Une autre personne constate que les jeunes accueillis sont de plus en plus complexes. « Recruter devient un challenge » dira-t-elle. Préconisant de travailler sur les risques du métier, mais aussi sur l’équité salariale et sur les liens parents-familles d’accueil.

Les soins pédopsychiatriques et … les autres : plusieurs mois d’attente !

Il est presque impossible pour les AF de faire suivre les enfants par un psychologue, un psychiatre, un orthophoniste, un ophtalmologue etc. Les délais pour obtenir un rendez-vous vont de plusieurs mois à un an ou plus, dans certaines spécialités. « Nos priorités ne sont pas les priorités des CMP (centres médico-psychologiques) » dira un participant.

Et lorsque les enfants sont renvoyés d’un établissement ITEP (Institut thérapeutique éducatif et pédagogique) ou d’un CAMSP (Centre d’Action Médicosociale Précoce), ils restent à la maison, sont désœuvrés et éprouvent un sentiment d’abandon. « Les oubliés de la République » titrait le reportage télévisé cité plus haut…

Manque de familles d’accueil : pas le temps de souffler entre un départ et une arrivée

Lorsqu’un enfant part d’une famille d’accueil, il y a tellement peu de ces dernières, que souvent, on re-propose immédiatement un autre enfant à la famille.

Cette dernière n’a donc pas le temps de « souffler un peu » avant d’accueillir un ou plusieurs autres enfants. Difficile…

Auteur ou victime d’attouchements : on ne le sait pas forcément !

Une personne, lors de la table ronde, raconte qu’on place dans une famille qui a de jeunes enfants, un jeune qui a, soit subi des attouchements, soit a été auteur d’attouchements, sans que l’assistant familial le sache. « Mais cela, nous ne le savons pas avant et c’est dommage… » dit-elle.

Les relais ITEP-IME pas assez nombreux

Les témoignages autour de cette table ronde sont unanimes et concordants : Les relais ITEP-IME ne sont pas assez nombreux. « Moins de la moitié des enfants bénéficient d’un accueil dans ces établissements ».

La présomption d’innocence pour les AF

Autour de la table, ce grave sujet est abordé. Yves Chastan, ancien sénateur, en 2010, attire l’attention de Mme la secrétaire d’État chargée de la famille et de la solidarité, sur un vide juridique préjudiciable aux assistants familiaux et assistants maternels.  

La profession d’assistant familial, devenue aujourd’hui essentielle dans l’équilibre de notre société, est particulièrement encadrée, à juste titre, puisqu’il faut que la protection des enfants soit totalement assurée.

Cependant, les personnes exerçant ces professions sont fréquemment confrontées à des accusations de maltraitance ou d’abus sexuels infondées. Les conséquences de ces accusations sont graves, tant au niveau professionnel qu’au niveau familial, et ne disparaissent pas toutes avec la clôture de la procédure.

Lorsque de telles accusations surviennent, elles sont traitées comme s’il s’agissait de faits avérés, sans attendre ni enquête, ni décision de justice. L’assistant familial ou l’assistant maternel se voit retirer les enfants confiés immédiatement, ce qui le prive de son emploi et de ses revenus. Ensuite, son agrément est suspendu pour une période de quatre mois, suspension qui est la plupart du temps suivie d’un licenciement arbitraire.

Il lui demandait donc qu’une réponse législative ou réglementaire soit apportée, pour que les assistants familiaux et les assistants maternels puissent bénéficier de la présomption d’innocence, au même titre que tous les autres professionnels de l’enfance. Leur agrément devrait être maintenu jusqu’à ce que la décision de justice soit rendue.

A ce jour, il semblerait que la situation soit en train d’évoluer.

Le centre départemental de santé montcellien

Les députés, à l’issue de cette table ronde, où chacun a pu s’exprimer, ont déjeuné au centre Saint-Exupéry à Blanzy (Cité de l’Amitié), avant de se rendre (pour Delphine Bagarry) au centre départemental de santé montcellien, où l’attendaient Marie-Claude Jarrot, maire de la ville et Marie-Thérèse Frizot, vice-présidente chargée de l’Enfance, pour une visite des locaux.

Le centre éducatif Le Méplier

Quant à Perrine Goulet et Caroline Ghulam-Nabi, elles se sont rendues au centre éducatif Le Méplier, où les dirigeants les ont guidées dans toute la structure.

Mme Goulet, très attentive, a écouté attentivement toute la détresse de ces responsables de foyers d’accueil. En effet, il est fait état d’un manque cruel de psychiatres, psychologues, infirmiers (ou du moins pas assez pour le nombre d’enfants accueillis).

Des enfants abrutis par les traitements médicamenteux

Une personne se désole face à ces enfants que l’on bourre de médicaments, faute d’avoir assez de médecins spécialistes pour s’en occuper individuellement…

Des gamines qui tombent dans la prostitution

Et un autre de déplorer que des filles entre 14 et 18 ans se prostituent, ou s’installent avec le petit dealer du coin, quand elles ne font pas exprès de se retrouver enceintes pour s’émanciper des structures, des parents etc.

Au final, lorsqu’on sort, on est malades et on a juste envie de pleurer sur ces gamins qui n’ont rien demandé et qui ont la double peine : l’abandon des parents et l’abandon de la République, en prime !

Le mot de la fin est collégial : les équipes d’éducateurs, de dirigeants, de soignants sont littéralement broyées par le système ! Il est urgent de tirer la sonnette d’alarme !

Et c’est bien ce que les députés ont promis de faire.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 



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