Du côté de la librairie…
Envie de lire… des polars
Envie de lire… des polars
Brrr…. Des trucs qui font froid dans le dos. Des romans qui nous empêchent de dormir… des polars, quoi ! Un tour du monde en 5 étapes histoires de frissonner…
Première étape de cette chronique : Londres. Lula Landry, célèbre mannequin, est retrouvée morte, défenestrée. Suicide ? John Bristow, le frère de la victime, n’y croit pas et frappe à la porte du détective privé Cormoran Strike. Cet ex-lieutenant de l’armée, revenu d’Afghanistan amputé d’une jambe, est au bout du rouleau : sa carrière de détective est au point mort et sa vie privée, un naufrage. Aidé par une jeune intérimaire finaude, virtuose de l’Internet, il reprend l’enquête. De boîtes de nuit branchées en palaces pour rock stars, Strike va passer de l’autre côté du miroir glamour de la mode et du people pour plonger dans un gouffre de secrets, de trahisons, et de vengeances.
Belle surprise que « L’appel du coucou », polar écrit par… la célèbre J. K. Rowling, mère de Harry Potter, qui écrit ici sous le pseudonyme de Robert Galbraight. Ce premier roman des aventures du détective Cormoran Strike va d’ailleurs être adapté dans une série télévisée sur la BBC. On le sent d’ailleurs à la lecture du roman : on voit presque les futures scènes grâce à ses descriptions d’ambiance et de personnages. Un dénouement inattendu, une aventure menée sans que l’on sache ce que pense le détective, et ce jusqu’aux dernières pages du roman : une belle réussite dont on attend la suite… qui vient juste de paraître !
Robert Galbraith. L’appel du coucou. Paris : Le Livre de Poche, 2014. 715 p. 8.30 €
Traversons la Manche pour revenir à Paris avec deux romans bien sombres.
Dans « L’heure des fous », Nicolas Lebel nous propose une plongée dans l’univers des sans-domicile. Paris : un SDF est poignardé à mort sur une voie ferrée de la gare de Lyon. Le capitaine Mehrlicht et son équipe sont mis sur l’affaire. Mais ce qui s’annonçait comme un simple règlement de comptes entre SDF se complique quand le cadavre révèle son identité. L’affaire va entraîner le groupe d’enquêteurs dans les méandres de la Jungle, campement de fortune au coeur du bois de Vincennes, dans le dédale de l’illustre Sorbonne, jusqu’aux arrière-cours des troquets parisiens, pour s’achever en une course contre la montre dans les rues de la capitale. Il leur faut à tout prix empêcher que ne sonne l’heure des fous…
Nous plongeons ici dans un univers inhabituel, où l’intrigue monte peu à peu dans le monde glauque et inimaginable de la vie parisienne souterraine. On se demande jusqu’où l’intrigue va aller, dans la rébellion engagée entre la société de consommation et ceux que l’on nomme ici les fous : les marginaux, les hors classe, les licenciés, les pauvres. Une vie marginalisée cachée qui va, jusqu’aux dernières pages, nous cacher une fin inattendue…
Nicolas Lebel. L’heure des fous. Paris : Marabout, 2014. Coll. Marabout Poche. 343 p. 6.99 €
Le romancier Michel Quin, bien connu pour ses polars, dont le célèbre « Effroyables jardins » paru en 2000, poursuit ses pérégrinations dans le roman noir. « Veuve noire » nous surprend également à Paris, mais en novembre 1918, le jour de l’armistice de la Grande guerre. Une jeune journaliste trentenaire ayant perdu son mari pendant la guerre, Léonie Rivière, tombe amoureuse d’un ancien combattant, Edgar Prouville. Désirant devenir marchand d’art, celui-ci entrepose des toiles chez Léonie. Mais un beau jour, il ne donne plus signe de vie. Avec l’aide du photographe Norbert Rameau, elle commence une enquête qui la mènera sur les traces d’un drame survenu en 1917 sur le Chemin des Dames, et peut-être sur celles de son mari.
Le roman a reçu le prix Plume de cristal 2014, récompensant le meilleur roman policier de l’année. Il retrace tout à fait l’ambiance parisienne de ces années de guerre, entre rationnement, grippe espagnole et montée du socialisme. Un très bon suspens historique.
Michel Quint. Veuve Noire. Paris : Archipoche, 2014. 288 p. 7.65 €
Un saut en avion, atterrissons à New-York pour poursuivre notre quête de « Fonds perdus »… Il n’y avait malheureusement pas que les fonds qui ont été perdus ! J’avoue, je m’y suis reprise à 3 fois pour passer les premières pages. Pourtant, le titre m’attirait beaucoup, mais le démarrage s’est révélé ardu, peut-être par manque de vocabulaire geek ou de connaissances du monde (très !) lexical de l’auteur. On part vite à la dérive dans une histoire parallèle peut-être réservée aux fans de Pynchon. Obscur et probablement génial, mais je n’en jugerai pas.
Au début des années 2000, en pleine vague Internet, Maxine, jeune mère de famille new-yorkaise inspectrice des fraudes en désamour avec son ancien employeur, se trouve embarquée dans une aventure financière. Mais pas que. Comment se fait-il que la start-up dirigée par Gabriel Ice, personnage on ne peut plus louche, n’ait pas été touchée par l’explosion de la bulle Internet qui vient de se produire. Lancée sur les traces de flux financiers qui transitent sur des comptes eux aussi très obscures, la jeune femme va découvrir petit à petit une zone de non-droit : celle du web profond. Elle y trouvera des hackers fous, des anarchistes, des petits ou gros voyous qui vont l’accompagner tout au long de son enquête.
Thomas Pynchon. Fonds perdus. Paris : Seuil, 2014. Coll. Fonction & Cie. 441 p. 24 €
Enfin, pour terminer ce tour du monde, et pour les plus jeunes, les éditions MSK proposent un bon polar dont l’intrigue se trame dans les bas-fonds d’une ancienne citadelle chinoise, Hak Nam (tout prêt de Hong-Kong). Dai, jeune garçon issu d’une riche famille, a 17 jours pour retrouver un document qui lui permettra de quitter l’infâme zone de non-droit. Il se trouve dans les mains de Longway, dealer, trafiquant de drogue et propriétaire de maisons closes. Mei Yee est l’une de ses filles, vendue pour quelques pièces par un père alcoolique, et dont la sœur, Jin Ling, tente de retrouver la trace afin de la sortir de la citadelle.
De terrasses en ruelles, une course-poursuite s’engage avant la destruction de la citadelle… Qui existe vraiment, et dont Ryan Graudin nous dépeint parfaitement l’obscurité, la tension, la saleté et la corruption. Ce roman est encore plus prenant quand on sait que l’auteure a elle-même connu les bidonvilles cambodgiens…
Ryan Graudin. Fuir la citadelle. Paris : MSK, 2014. 389 p. 17 €
Un grand merci à Virginie, Papimi et Mamico qui, grâce à leurs lectures attentives, m’ont grandement aidée dans l’approche de cette littérature jusqu’ici bien obscure !
Véronique Décrenisse-Kieny