Montceau-les-Mines – Agression sur la fête foraine
Des peines de 42 mois et 30 mois de prison ferme pour une « lâche » agression à la fête foraine
Ils étaient à quatre contre un. Ils étaient armés. Ils ont attaqué leur cible par surprise, dans son dos. Derrière son crâne plus précisément. C’était le 6 septembre dernier à la fête foraine à Montceau-les-Mines.
Ils étaient quatre mais ils ne sont que deux à comparaître, ce jeudi 18 septembre, selon la procédure de comparution immédiate. Présentés au procureur de la République hier, ils ont été placés en détention provisoire.
L’un a 27 ans, l’autre en a 20. Ils sont du Creusot, les deux. Ils contestent être pour quoi que ce soit dans cette « lâche » (l’avocat de la partie civile leur fera dire ce mot) agression.
Ils contestent mais leurs avocats, maître Varlet et maître Lépine, plaideront les peines et des éléments à charge « ténus ». « Je ne plaide pas la relaxe, il est évident qu’il y a eu une participation. »
La présidente interroge le plus âgé des prévenus : Que faisait-il à la fête foraine à Montceau-les-Mines, le 6 septembre en soirée ? La réponse sent non les churros mais la provocation : « J’aime bien les crêpes au Nutella, et j’ai fait un manège. »
Dans la salle, un tout jeune homme, pâle, est assis, entouré de sa famille. Il est la victime principale de cette agression caractérisée par une particulière sauvagerie.
Un problème entre deux familles serait la cause de cette « expédition punitive » ?
Cette affaire serait née, selon ce qui est dit à l’audience, d’une histoire intestine de contentieux entre deux familles. Et, toujours selon ce qui est dit à l’audience, « on » voudrait bien ou « on » aurait voulu que tout reste entre soi, et que ni police ni justice ne s’en mêlent.
Sauf que le 6 septembre en soirée, quand la police du Creusot est appelée en urgence sur la fête foraine de Montceau, un jeune homme de 17 ans est au sol. « Il saigne abondamment du cuir chevelu. »
Les faits
Une particulière sauvagerie. Elle a surgi avec un premier coup, violent, fort, donné à l’arrière du crâne d’un jeune qui déambulait avec un copain. Le jeune homme en est projeté au sol. Alors qu’il est à terre, il prend « une pluie de coups ». Il est blessé. Il perd connaissance.
Des coups délibérément portés à la tête. La matraque télescopique de l’un des agresseurs était devenue impossible à replier : tordue à force de frapper. C’est dire la force qui y a été mise.
Un tel acharnement, le soin de viser la tête, ça peut tuer, aussi bien
Un médecin constate chez la victime, un « décollement de la membrane du cerveau », un écoulement de liquide dans le crâne, une fissure du nez, une fracture de la clavicule, et des contusions importantes, forcément. 21 jours d’ITT.
Le copain qui l’accompagnait a voulu s’interposer et a été frappé lui aussi, et gazé. L’autre, à terre, « ne bougeait plus ».
Un tel niveau de violence a évidemment agité du monde, sur place. L’ambiance était « tendue » à l’arrivée de la police.
Un contexte venimeux et des menaces en veux-tu en voilà
La victime principale dira, quand il sera possible de l’entendre, qu’il pense que ces gens « ont été payés » pour le démolir. Entre mai et juin dernier il a signalé au commissariat plusieurs tentatives d’agressions contre lui. Maître Zaalouni (barreau de Lyon) y reviendra: « Il a été coursé, menacé, harcelé. A chaque fois je lui ai dit de déposer plainte, mais rien n’a été fait… et il s’est passé ce qui s’est passé. »
« On va brûler ta maison et s’en prendre à ta famille. On sait qui tu es »
Cette agression insensément féroce viendrait donc, si on les croit, d’un contentieux entre deux familles. Un contentieux à mort ? En tous cas un contentieux à « omerta » (la procureur emploiera le mot) qui ne s’est pas calmé bien au contraire puisque le gérant d’un snack présent sur la fête foraine, témoin à la procédure, a reçu hier soir, le 17 septembre, veille de l’audience, un appel d’un collègue à qui un « quelqu’un » avait ordonné de sommer le gérant de retirer ses déclarations en lui transmettant les menaces suivantes, transcrites dans un PV de renseignement judiciaire dressé ce matin-même : « On va brûler ta maison et s’en prendre à ta famille. On sait qui tu es. » Et on lui fait passer que cette affaire vient dans le cadre d’une vendetta que finalement ces gens considèrent comme « privée » – au mépris de tout ce qui structure une société (les lois).
« La famille de mon client a reçu les mêmes menaces » intervient maître Elyes Zaalouni.
Ce contexte se ressent aussi pendant l’audience. Des échanges fugaces, des signes : ce n’est pas serein.
L’enquête se poursuit
Les deux prévenus ont été identifiés sur planches photographiques, par un témoin qui ne les connait pas du tout. Et puis un troisième nom est sorti, un nom de famille identique à celui d’un prévenu à venir la semaine prochaine dans un procès pour trafic de drogues. C’est le bâtonnier Varlet qui y fait allusion : « X est désigné et on ne le touche pas alors qu’il est sous main de justice ? » L’avocat ajoutera : « La question du mobile, vous n’en saurez rien. » Cela engage qu’il ne croit pas un instant à cette histoire d’une vendetta orchestrée par une famille contre une autre pour un motif d’ordre « privé ».
État de récidive légale pour un prévenu, faits commis pendant sa probation pour l’autre
La procureur prend le temps de balayer tout ce dont la défense pourrait se servir, quant à un contenu « ténu » du dossier comme dira maître Lépine. Ténu mais pas inexistant pour autant : la procureur liste absolument tout ce qui vient à charge contre les prévenus. Elle demande que le plus jeune soit dit en état de récidive légale pour une peine datant de 2023 (vol en réunion avec violence, tribunal pour enfant). Elle souligne que le plus âgé a commis ces violences « extrêmement importantes » alors qu’il était en période de probation (7 condamnations portées à son casier).
Elle requiert des peines qui seront prononcées par le tribunal, peines complémentaires comprises, pour ces « faits gravissimes ». Le tribunal en réalité ira un poil au-dessus des réquisitions pour le plus jeune des prévenus.
« Dans ce dossier, j’ai des menaces jusqu’à la dernière minute avant l’audience »
« Les victimes ont 17 ans. Ceux dans le box ont 27 et 20 ans. C’est étonnant pour des gens issus des quartiers que tous les codes d’honneur aient été bafoués : frapper un mineur, frapper par derrière. On nous a demandé de retirer nos plaintes, moyennant de l’argent. Et ça encore, c’est un moyen que je qualifie de doux, car dans ce dossier, j’ai des menaces jusqu’à la dernière minute avant l’audience. Nous n’aurons pas peur et à chaque fois nous ferons le nécessaire. L’arsenal judiciaire est en marche » plaidait l’avocat de la partie civile.
42 mois de prison pour l’un, 30 mois de prison pour l’autre, avec maintien en détention
Le tribunal dit les deux hommes coupables, retient l’état de récidive légale pour le plus jeune, condamne :
– Le plus âgé à la peine de 3 ans de prison avec maintien en détention, à la révocation totale du sursis probatoire prononcé en 2024, soit 6 mois avec incarcération immédiate : ça fait 42 mois de prison
– Le plus jeune à la peine de 30 mois de prison avec maintien en détention.
Peines complémentaires pour les deux :
Interdiction de détenir et/ou de porter une arme pendant 10 ans,
Interdiction de tout contact avec les victimes pendant 3 ans,
Interdiction de contact avec le co-auteur pendant 3 ans,
Interdiction de paraître à Montceau-les-Mines.
Enfreindre une peine complémentaire engage de nouvelles poursuites et de nouvelles comparutions devant un tribunal.
FSA