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lundi 5 novembre 2012 à 20:50

Thomas Thévenoud répond à Mc Donald’s

"Cher, très cher, Ronald McDonald’s"… dans un quotidien national aujourd'hui



 

Le 30 octobre, Mac Donald’s s’était payé une pleine page dans cinq quotidiens nationaux pour dénoncer le rapport sur la TVA réduite dans la restauration ainsi que les chiffres avancés par le député socialiste.

Une campagne peu appréciée à laquelle il a aujourd’hui répondu, également par voix de presse. Thomas Thévenoud a lui même pris sa plume dans le journal Libération :

 

 

« Cher, très cher, Ronald McDonald’s »,

 

Si je t’écris, moi élu de ce petit bout de France, c’est pour répondre à ton message intitulé : « Encore un petit effort M. Thévenoud… » J’ai été surpris de découvrir cette pleine page dans les journaux de notre pays. Cette publicité a dû te coûter un prix fou, surtout dans la période difficile que tu dis traverser.

D’après mes calculs, l’argent que tu y as consacré aurait permis de rémunérer une bonne vingtaine de tes salariés pendant un an.

Excuse-moi d’avoir voulu évaluer le coût de cette baisse de la TVA mais, en France comme ailleurs, la mission qu’on assigne à un député est de contrôler l’utilisation des deniers publics. Je n’ai donc fait que mon travail. Aujourd’hui, je voudrais te parler de la France et des efforts que notre pays t’a consacrés depuis des années.

 

Ce pays t’a accueilli il y a trente-trois ans. Souviens-toi, cher Ronald, c’était à Strasbourg.

Depuis, que de chemin parcouru ! Tu réalises aujourd’hui un chiffre d’affaires de 4 milliards d’euros par an en France soit un sixième de ton chiffre d’affaires mondial. Avec une croissance annuelle de 6% à 8%, tu peux faire pâlir d’envie bien des entreprises. Tu emploies près de 63 000 de nos concitoyens dans tes 1 200 établissements et, chaque année, une trentaine de tes restaurants ouvrent dans notre pays. Bravo !

Ces chiffres sont issus de ta propre communication et je veux croire que le simple fait pour moi de les reprendre ne les entachera pas d’insincérité à tes yeux. Inutile donc de dépenser à nouveau des milliers d’euros pour les confirmer. Pourquoi la France, ce vieux pays de gastronomie et d’art culinaire, est-elle devenue ton second marché après les États-Unis et pourquoi la plus belle avenue du monde accueille-t-elle l’établissement le plus rentable de McDo ?

 

Ne crois-tu pas, cher Ronald, que la raison est à chercher du côté d’un environnement fiscal et social favorable ? Étudions-le ensemble.

Dans notre pays, l’État, c’est-à-dire le contribuable, allège les charges jusqu’à 1,6 Smic, ce qui englobe l’immense majorité de tes salariés. Autrement dit, la collectivité nationale subventionne une bonne partie de ta politique de recrutement. Depuis l’origine, tu bénéficies aussi d’un taux de TVA préférentiel pour la vente à emporter.

En 2009, le gouvernement a décidé d’aller plus loin et t’a permis d’encaisser 190 millions d’euros brut supplémentaires par an grâce à la baisse du taux de TVA dans la restauration. Comment les as-tu utilisés ? 79 millions d’euros reversés aux salariés grâce à la création de 3 000 emplois de plus chaque année. Je ne conteste pas ce chiffre. Mais quel était le rythme de création d’emplois avant la baisse de la TVA ? Tu ne le dis pas. C’est pourtant la différence entre ces deux chiffres qui permettrait de mesurer l’effet de la baisse de la TVA ou alors tu conviendras avec moi que tu as juste profité d’un effet d’aubaine. 28 millions d’euros pour baisser de 5 % le prix du menu phare, le Big Mac. C’est bien. Mais quelle est l’évolution des prix sur tes autres produits ? Tu ne le dis pas. 64 millions d’euros d’investissement.

Je croyais que, dans une entreprise privée, les profits d’aujourd’hui devaient financer les investissements de demain. Tu dis avoir lutté contre la pollution visuelle en réduisant la hauteur des totems qui annoncent tes restaurants et avoir économisé l’énergie en équipant tes cuisines de pompes à chaleur. Bravo, cette conscience écologique t’honore mais pourquoi est-ce au contribuable de subventionner tout ça ?

 

Au total, tu confirmes qu’il t’est resté dans la poche 19 millions d’euros net par an grâce à la baisse de la TVA. Ce n’est pas rien, tu le concéderas. Une subvention sans contrepartie de l’État de 48 millions d’euros du 1er juillet 2009 au 31 décembre 2011, ça permet de voir venir, n’est-ce pas ? Finalement, ce qui me surprend le plus, c’est que toi qui incarnes les lois du libéralisme, tu continues à justifier en France un soutien de l’État qu’il ne te viendrait pas à l’idée de réclamer dans ton pays natal.

Tu conviendras, cher, très cher Ronald, qu’il y a là une incohérence.

Pour continuer sa marche en avant, ce pays doit redresser ses finances publiques et permettre à ses entreprises de regagner en compétitivité. C’est ça le redressement productif. Si l’État doit aider les entreprises, ne crois-tu pas qu’il faudrait qu’il soutienne d’abord celles qui sont le plus exposées à la concurrence internationale ? C’est ce qu’a choisi de faire Barack Obama en soutenant l’industrie automobile dans ton pays natal. La fiscalité n’est pas juste un moyen de gagner plus ou moins d’argent, c’est un moyen d’orienter la production d’un pays et de soutenir son économie.

Tu vois, je n’ai rien contre toi. Je pense que la subvention publique dont tu as bénéficiée n’est plus justifiable dans une période où le pays doit faire des efforts.

Dans ta dernière campagne de pub, tu dis à tes clients : « Venez comme vous êtes. » Moi je te dis : « Regarde la France comme elle est. » Elle t’a accueilli avec bienveillance, elle t’a respecté, elle t’a aidé. Aujourd’hui, elle souffre. Alors, encore un effort, cher, très cher Ronald, pour être une entreprise citoyenne. »

 

 

 

 

 

 



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