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mercredi 18 février 2015 à 06:49

Musée de la Maison d’Ecole (Sortir)

Aujourd’hui : écolières et écoliers d'autrefois



 

 Aujourd’hui :

 

écolières et écoliers d’autrefois

 

Le costume des écoliers :

 

« Maman est déjà passée me réveiller. Je garde encore la pression de sa main sur l’édredon. « Lève-toi (..), tu vas être en retard! » La journée n’est pas encore commencée et je dois déjà me dépêcher…

 

 

 

Sur la chaise, adossée au lit, trônent les vêtements de la journée. La chemise empesée, le vilain chandail de grosse laine et la culotte courte de drap bleu. Seuls les grands portent des pantalons… Les galoches doivent être dans la cuisine, soigneusement cirées par maman. J’entends la voix de papa qui s’apprête à partir au travail. Assis sur le bord du lit, j’essaie de réunir les pièces du puzzle de ma journée : à 8 heures, morale, puis lecture et histoire; à 10 heures, écriture et leçon de choses… Bon sang, il ne faut pas que j’oublie de ramener une noix pour la classe… » (in « Vive la récré », F.Bertin et P.Courault)

 

 

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Ecoliers vers 1900 (collection musée)

 

 

 

 

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Ecole de filles de la rue Centrale (rue Carnot) à Montceau, 1904

 

 

 

 

 

Voilà le décor planté… On notera la modestie de la tenue que l’écolier allait revêtir pour aller à l’école. Le costume des écolières et des écoliers était très variable dans les temps plus anciens, bien avant que la mode et les « marques » n’instrumentalisent tout le monde scolaire.

 

 

Il variait souvent selon les origines : enfants des villes ou enfants des campagnes, ou selon l’appartenance sociale. Certains avaient leurs habits « de tous les jours », d’autres avaient leur tenue d’école qu’il fallait poser à chaque retour de classe, afin de ne pas trop la salir jusqu’à la prochaine lessive (les moyens ne permettaient pas le changement journalier rendu possible avec l’arrivée de la machine à laver le linge et la profusion d’habits!). Une jupe de drap, une simple culotte et un chandail bien chaud, un capuchon en cas d’intempéries, étaient souvent le lot de la plupart. Le milieu rural se caractérisait par le port de sabots, de claques ou de galoches à semelles de bois. Les citadins, parfois issus d’un milieu plus aisé, possédaient des bottines, des souliers ou des chaussures montantes en cuir.

 

 

Malgré toutes ces différences, les écolières et les écoliers portaient cependant tous une longue blouse ou un sarrau qui participait à une uniformisation de façade et gommait les inégalités. Souvent, ces blouses, étaient de couleur noire, ce qui cachait les taches et les salissures diverses. Quelques détails changeaient : liserés de couleur, boutons personnalisés, coupe plus ou moins raffinée. Les tenues plus colorées firent leur apparition entre les deux guerres… d’abord chez les filles.

 

 

 

 

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Blouses pour les filles (collection musée)

 

 

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Sarrau pour les garçons (collection musée)

 

 

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Et blouse pour le maître (collection musée)

 

 

 

 

LES RITES SCOLAIRES :

 

Il n’est pas de sociétés durables sans rites d’identification et d’intégration. Il en va de même pour l’école. Les rites de la rentrée sont les plus forts : ils impliquent infiniment plus que de simples débuts ou de nouveaux retours en classe. Tout d’abord, la rentrée est rite de normalisation vestimentaire. Relisons ce que Charles Péguy écrivait à ce sujet :

 

« Quelques jours avant la rentrée des classes, on m’acheta un beau képi neuf, on me fit faire de beaux sarraus noirs pour aller à l’école ; on m’acheta un sac d’écolier, un beau sac neuf, jaune, en toile et en cuir avec des dessins, et une courroie en cuir glacé ; on m’acheta des beaux crayons neufs à un sou, des beaux porte-plumes neufs, et de belles plumes neuves ».

 

 

Elle est aussi la découverte de la discipline et de l’agressivité collectives, force principale des armées. « Les maîtres frappèrent dans leurs mains », les enfants cessent de jouer, se mettent en rang par taille, rentrent au pas dans la classe en chantant en cœur, « Aux premières notes de la chanson (…) une émotion de surprise et d’admiration anxieusement indéfinissable m’avait tout entier et définitivement envahi ; jamais je n’aurais supposé que l’on pût comme eux chanter et marcher d’un seul accord, au lieu de marcher comme tout le monde. » L’école publique forme le soldat-citoyen dont la patrie a besoin pour être forte et défendue. Dans la cour, l’écolier découvre à la fois la solidarité réconfortante de sa bande, mais aussi l’agressivité inquiétante des bagarreurs.

 

 

 

Ce souvenir de la collectivité se trouve conservé dans la photographie scolaire dont l’habitude rituelle se prend dès les débuts de la Troisième République, moment scolaire annuel unique où l’élève endimanché, pose autour de son maître pour une photographie dont l’unique destin semble être de prouver qu’il était là, comme naguère les grognards à Austerlitz. Curieux souvenir mais témoignage si riche pour l’historien, tout y est : nombre d’élèves dans la classe, répartition des divisions, habits bourgeois du maître moustachu, sarraus uniformes des gamins aux crânes tondus, aux pieds reflétant leur classe sociale (bottines, galoches ou sabots), jusque, parfois, aux yeux exorbités des enfants d’alcooliques comme sur la planche murale du Dr Galtier-Boissière…

 

 

 

Un autre grand rite scolaire est l’appel bi-quotidien des présents, être noté « absent » à l’un de ces appels (qualificatif identique à celui du code militaire), entraîne une présomption de désertion, en l’occurrence, d’école buissonnière. Toute absence doit donc être justifiée et, qui plus est, par un « mot » des parents. Cette pratique est à l’origine d’une variété ahurissante de bouts de papier « portés au maître » comportant quelquefois une graphie sommaire ou des explications rocambolesques et montrant crûment la distance abyssale qui sépare l’école institutionnelle et le milieu familial des élèves.

 

 

 

LA MIXITE A L’ECOLE :

 

 

Sous la IIIème République, garçons et filles fréquentent des écoles séparées. Seules quelques classes uniques mixtes existent en milieu rural.

 

Après la seconde guerre mondiale, la destruction de certains bâtiments scolaires fait que l’on regroupe les deux sexes dans un seul établissement remis en état : c’est la mixité « économique ».

 

Gustave Monod crée des lycées pilotes où apparaît la mixité « pédagogique », mais celle-ci se heurte à des tabous sexuels très forts. Mais bientôt la croissance des effectifs et l’application de la loi de 1957 qui reconnaît aux familles le droit d’inscrire leurs enfants dans le lieu d’enseignement le plus proche de leur domicile, vont faire progresser peu à peu et de manière irréversible l’idée de mixité. Elle deviendra la règle à la fin des années 1960 et se généralisera dans les années 1970 dans un grand débat politique.

 

 

LE TRAJET DE LA MAISON A L’ECOLE :

 

 

Malgré le souci qu’avaient montré les concepteurs des lois de 1890 sur l’implantation des Maisons d’Ecole, le trajet pour y arriver reste parfois long dans les habitats ruraux dispersés. La demande avait été faite aux maires d’établir les écoles au centre géographique de leur commune et c’est ainsi que l’on a vu fleurir des Maisons d’Ecole en rase campagne, éloignées du bourg, ce qui laissait deviner l’éclatement de la commune en divers hameaux.

 

 

Ces implantations avaient pour but de partager les distances parcourues par les petits écoliers, mais ce ne fut semble-t-il pas suffisant pour endiguer l’absentéisme des débuts de l’école publique.

 

 

L’éloignement de l’école n’est cependant pas l’apanage des campagnes à en croire ce texte souvenir d’un élève de l’école de la rue de l’Est :

 

« … cette école de la rue de l’Est qui, pour beaucoup d’entre nous, est au bout du monde. A trois ou quatre, nous arrivons du Bois-Roulot, après d’interminables cheminements. Il faut bien 20 minutes, l’éternité ou presque, pour en venir, y retourner, quatre fois par jour donc, dans un sens ou dans un autre… »

 

 

 

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Ecole maternelle de Bellevue, à Montceau, 1911 (collection musée)

 

 

 

 

Patrick PLUCHOT
Président de la Maison d’Ecole
Collection Ecomusée de la CUCM-Musée de France

 

 

 

 

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