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mercredi 31 octobre 2012 à 23:08

TVA dans la restauration

Un rapport de mauvais goût pour les restaurateurs !



 

 

Un rapport de mauvais goût !

 

 

Thomas Thévenoud vient de rendre public son rapport sur la baisse de TVA dans la restauration. S’il estime que les restaurateurs n’ont pas respecté leurs engagements ces trois dernières années, les professionnels de ce secteur ne sont pas vraiment du même avis. Ils fustigent les conclusions du parlementaire et donnent des chiffres tout à fait différents.

En Saône-et-Loire, Patrick Revoyre, président de l’UMIH (Union des métiers et des industries hôtelières) juge l’attitude du député irresponsable… Pour plusieurs raisons.

 

 

 

 

 

L’ambiance était tendue hier au Château de la Barge à Crèches-sur-Saône. Le propriétaire des lieux et président de l’UMIH 71, accompagné de quelques uns de ses collègues, avaient convié la presse pour tirer le signal d’alarme. Leur profession est en danger ! Avec la crise, oui, mais encore plus depuis la publication du rapport Thévenoud et les préconisations qui s’en suivent.

« Nous avons à faire avec un député qui n’a aucune connaissance de notre secteur d’activités, ni de son mode de fonctionnement, s’insurge Patrick Revoyre. C’est à croire qu’il a fait connaissance avec notre profession quand on lui a demandé ce rapport. Ce qu’il dit est complètement irresponsable et il n’imagine pas l’impact qu’un tel rapport va avoir sur la restauration ! »

 

 

« Ses chiffres sont faux ! »

 

 

Selon le député, les engagements pris par la profession en 2009, lors de la baisse de la TVA, n’ont pas été intégralement respectés : à savoir une baisse des prix de 3 % et des créations d’emplois moindres que celles demandées. « Mais ses chiffres sont faux, » selon le président de l’UMIH. Pour lui, on a coûté 3 milliards d’euros, nous lui répondons qu’on a créé 40 000 emplois. »

Sur la baisse des prix, quand le député annonce un taux de 2,2 %, les restaurateurs parlent de 2,97 %. « Le contrat prévoyait 3 % c’est vrai, on est en dessous, mais pas autant qu’il l’annonce, en plus nous sommes dans une période où tout a augmenté : les charges, les prix… ! », avance Patrick Revoyre qui ajoute que Bercy et l’INSEE ont confirmé les chiffres des restaurateurs.

En ce qui concerne les emplois, 53 000 ont été créées entre 2009 et 2011, avec la baisse de la TVA. « C’est loin des 5 000 qu’il avance ! » En Saône-et-Loire, 160 emplois ont vu le jour sur cette période et trente établissements ont ouverts.

 

 

« Nous avons réinvesti dans l’économie locale »

 

 

Ce rapport est incompréhensible pour les restaurateurs qui regrettent que le député s’arque-boute sur le volet investissement : « L’État n’est pas notre financeur, il faut que ce soit clair ! Nos établissements avaient besoin d’être modernisés pour répondre à certains règles. Sans un soutien de l’État, certains auraient du fermer ou accueillir leurs clients dans des conditions inacceptables. »

Sur cet investissement soutenu par l’État, les restaurateurs se défendent en disant qu’ils ont réinjecté l’argent dans l’économie locale. « Il nous a bien fallu des électriciens, des plombiers… bref, des artisans pour faire ces travaux de modernisation et d’adaptation. Quand on dit qu’on a coûté 3 milliards d’euros, il ne faudrait donc pas oublier de signaler qu’on a investi dans du matériel nouveau et performant, dans des travaux et que l’argent a été réinjecté localement et que nous avons participé à la création d’emplois ! Il ne s’agit pas de fonds perdus pour l’État ! »

 

En ce qui concerne les retombées de cette baisse de la TVA sur les employés, le président de l’UMIH assure que deux jours fériés supplémentaires ont été accordés, ainsi qu’une mutuelle. Les salaires ont également été revalorisés de 4,1 % sur deux ans, soit 5,7 % depuis l’harmonisation de la TVA. « Ce rapport est donc malhonnête et travesti la réalité des choses ! Cela traduit bien sa méconnaissance du terrain », n’hésitent pas à dire les restaurateurs du département.

 

 

« Si on répercute cette hausse, il y a un vrai danger ! »

 

 

Les deux propositions faites par le député (à savoir un retour au taux de 19,6 % ou la création d’un nouveau taux intermédiaire, non chiffré ainsi que la mise en place d’un plan qualité) sont tout aussi indigestes pour l’UMIH. « L’Europe nous interdit un taux intermédiaire supplémentaire, explique Patrick Revoyre. Ce qui veut dire si on passe à 11 ou 12 %, on va emmener avec nous tout le monde. Tous ceux qui sont à 7 % passeront à 11 ou 12 %. Quant au fait d’envisager un travail au mérite et à la qualité, c’est mettre le feu à la maison et montrer du doigt certains établissements. »

« Et comment va t-on s’en sortir si on nous augmente la TVA ?, s’interroge Patrick Chauveau de l’Hôtel de Bourgogne à Mâcon. Ça plus ça plus ça et tout le reste, au bout l’addition est très salée. Il ne faut pas oublier qu’à l’origine la baisse la TVA dans la restauration c’était surtout pour réparer une injustice : les ventes à emporter étaient taxées à 5,5 %, les restaurateurs traditionnelles à 19,6 % Cela veut dire que les années précédentes, l’État avait déjà bien profiter ! Aujourd’hui, si on répercute cette nouvelle hausse sur nos additions, il y a un vrai danger. »

 

 

« Si on ferme, c’est la mort assurée des communes rurales ! »

 

 

Un danger pour la restauration, le directeur de l’Hôtel mâconnais a d’ailleurs annoncé qu’au 12 décembre, il fermerait le restaurant de son hôtel, soit six personnes licenciées : « Je gagne zéro en restauration et c’est 80 % des problèmes ! »

Mais le danger est également touristique. « Thomas Thévenoud oublie que nous sommes en relation avec le ministère du Tourisme. Il oublie l’importance que nous avons dans le paysage français. Cluny, Paray, Solutré… les touristes attendent de trouver dans ces villes des hôtels restaurants.  S’il n’y en a plus, ils ne resteront pas. Parfois nous sommes les derniers commerces à subsister dans le paysage rural. Si on ferme, il n’y aura plus de vie. C’est la mort assurée des communes rurales », s’inquiètent les restaurateurs.

 

« On a vraiment l’impression d’avoir en face de nous une personne dogmatique, termine Patrick Revoyre. Il a travaillé à charge dans ce dossier et c’est scandaleux. Quand une profession marche on veut lui mettre la tête sous l’eau. On est un métier de passion et d’insertion, nous sommes fiers de mettre le pied à l’étrier à certains jeunes. On est même en Saône-et-Loire le premier employeur commercial privé. Et, malgré cela, on essaie de nous faire passer pour des bandits ! »

 

La prochaine rencontre entre le député socialiste et les restaurateurs au congrès national de l’UMIH à Dijon, fin novembre, risque donc d’être tendu ! Très tendu…

 

 

Delphine CRESSON

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 




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